INJURIES • BLESSURES / Participants / Participantes

  Tu étais là et je n’ai rien vu venir. Tu es là depuis toujours et s’est moi qui t’ai porté, âme errante venu se loger, se blottir. Je suis un peu de toi tu es un peu de moi, nous sommes un. 
 Une enfant sans nom, sans visage, une enfant oubliée de tous. Et tu es là aujourd’hui. Tu es venue me voir, pour ‟être‟ simplement. Tu t’es manifestée parce que tu as confiance en moi, et tu sais que je suis prêt aujourd’hui à te ‟recueillir‟ petite fleur, à t'écouter, à ressentir ta présence bienveillante.
 Qui es-tu petite sœur, à quoi as-tu joué tout ce temps passé dans l’oubli. A la princesse ? Tu es une princesse, à la poupée ? Tu es une poupée de porcelaine, portant des bracelets trop lourds pour tes petits poignets. 
Tu es venu à ma rencontre pour qu'aujourd'hui tu puisses porter un nom, un nom que tu as choisi, Tendresse. Merci de ta confiance petite sœur, aujourd'hui tu existes dans mon cœur, tu peux y rester ou choisir de partir, libérée puisqu’aujourd’hui je peux t'appeler, de nommer ...TENDRESSE. 

FRANÇOIS BRULE/ Décembre 2020
 Fin de partie
C’est comme un vêtement trop étroit que l’on met quand même pour avoir chaud.
C’est comme une chanson de Barbara et le bruit des sillons de 33 tours usés.
C’est comme une femme à genoux qui prie bien qu’elle ne sache pas à qui adresser son appel.
C’est comme une paire de boucles d’oreilles très ancienne et précieuse que l’on n’osera pas porter alors on les regarde souvent.
C’est comme un après-midi d’avril quand tout commence à réapparaître et on ne sait pas quoi exactement.
C’est comme les lignes dans un cahier, jamais écrites.
C’est comme des mains qui vous attirent, vous voulez fuir, vous ne pouvez pas, les mains s’agrippent.
C’est comme l’image de quelqu’un qu’on ne connaît pas et pourtant ce visage-là, on le sait, nous ferait du bien, pourrait tout changer.
C’est comme le velours rouge et le sang dans les veines.
C’est comme tout un peuple qui crie ce qu’il veut et que personne n’entend parce que le reste du monde crie encore plus fort ce qu’il ne veut pas.
C’est comme une horloge arrêtée tandis que le temps passe.
C’est comme quelque chose de tranchant dont on ne cesse de s’approcher sans savoir combien ça coupe.
C’est comme un film qu’on voudrait revoir.
C’est comme la beauté d’une statue blanche.
C’est comme la nuit sans étoiles, sans lune, d’épais brouillard, opaque mais tendre dans sa réconfortante moiteur continue.
C’est comme le pouls d’un petit animal blessé et les larmes de l’enfant qui s’apprête à connaître l’adieu.
C’est comme un regard très fort qui se retient de ciller pour voir toujours, toujours.
C’est comme les gens dans le petit jour qui vont quelque part où on ne les attendra pas.
C’est comme l’orage, l’ogre et l’or qu’on a beau effeuiller, il devient plus précieux encore.
C’est comme ça, sans amertume, sans regret parce que c’est là malgré tout, ça existe, ça vous tue et ça vous fait vivre à la fois, on ne sait jamais si en le gardant on va le perdre ou si en le perdant on va le garder, on ne sait rien faire avec alors on s’assoie.
C’est comme ça.
Ça s’appelle l’amour impossible.
C’est l’amour tout de même, on s’habille, et on a toujours un peu froid.

SYLVIE GOUSSOPOULOS / Décembre 2020
 Nous montons ma mère et moi les escaliers de l’hôpital, toutes les deux en précipitant nos pas et sans qu’aucune de nous deux prononce un seul mot.
A ce moment-là j’ai un sentiment de peur bizarre, la peur de ce qui nous attend en arrivant dans sa chambre. Comment allons-nous la trouver ? Est-elle encore vivante ? Respire-t-elle mieux ?
Et là je sents mes jambes se paralysées, je n’arrive plus à monter et je me pousse à peine et j’ai l’impression qu’à ce moment là ma mère a le même ressenti que moi mais aucune de nous deux n’ose le dire.
Nous arrivons enfin dans la chambre... Voilà qu’elle dort comme un ange ma pauvre petite soeur après avoir souffert toute la nuit d’une crise d’asthme grave.
ILHAM LABBIHI / Janvier 2021
 Tu es parti avant de finir de commencer ta vie.
Tu m’as accompagné dans ces commencements et tu continues maintenant que passent les jours qui me voient vieillir.
La jeunesse est éternelle et inoubliable et tu me rappelles quand je ne vais pas bien que c’est déjà un privilège.
Repose en paix mon cousin fraternel.

FREDERIC BRICKS / Janvier 2021
  J’avais douze ans et je me rappelle m’être trouvée devant le juge pour enfants avec mon père et ma mère.
Le juge demanda à mes parents ce qu’ils comptaient faire pour m’aider. Mes parents étaient divorcés et je vivais très mal cette situation.
Il se tourna vers mon père en premier et là j’entendis de la bouche de cet homme.
“ Ce n’est pas mon problème je renie cette enfant.”
II se retourna vers ma mère même question.
“J’ai quatre autres enfants et je n’ai pas le temps de m’occuper d’elle.”
Un grand trou noir devant moi que vais-je devenir ? pourquoi mes parents ne veulent pas de moi ?
Le juge me regarda avec un regard protecteur et me dis.
« Ne t’en fais pas, notre rôle est de t’aider à te sentir bien et aimer. »
Peu de temps après je fus placée dans un foyer où j’ai été écoutée, aimée et accompagnée vers la lumière de mon avenir.
Merci à eux car même si la blessure ne disparait pas elle s’atténue avec les années et l’amour que l’on trouve sur son chemin.


CATHERINE LIGNOT / Janvier 2021
 Phnom Penh – Cambodge -  avril 1992

Deux petites filles s’apprêtent à prendre le taxi pour l’aéroport de Pochentong.
Je me souviens.
Je te vois encore papa.
Je te vois encore maman.
Maman tu pleurais, tes larmes coulaient le long de tes joues creuses, tes lèvres tremblaient.
Tu nous chuchotais des conseils encore des conseils des mots doux encore des mots doux. 
Des bisous encore des bisous.
Je ne comprenais pas, ne comprenais pas pourquoi, tant d’émotion tant de larmes.
Et toi mon papa, mon doux papa plus discret plus retenu, les mots te manquent les larmes t’échappent, ta gorge serrée, sans cligner des yeux tu nous prenais dans tes bras. 
Tes bras chauds de doux papa.
Je ne comprenais pas pourquoi tant d’affection, ne comprenais pas pourquoi tant d’affliction.
Nous partions juste à côté dans un pays voisin juste à côté….
Oh ma sœur, ma douce sœur que nous ont-ils fait ? Oh ma sœur, que ferai-je sans toi.
Je me souviens des nuits de larmes. Je me souviens des nuits de chagrins.
Je me souviens de tant d’années d’isolement et de blessures. 
Je me souviens des nuits de silence de souffrances étouffées, des poings fermés, de mon corps glacé.
Je me souviens encore. Mais, je ne veux plus me souvenir…
Je ne veux plus me rappeler…Ne veux plus revenir dans ce passé…
Oh ma sœur, comment deux petites filles auraient pu se protéger sans ses parents, sans sa famille à l’autre bout du monde, sans identité sans vocabulaire ?
Papa maman venez nous chercher. 
On veut rentrer à la maison.

S0PHAL SAN / Janvier 2021 

                                                                             Nana ma merveille Nana, merci pour ta fenêtre ouverte.
 Mémoire d'adolescent
Je ne veux pas rentrer chez moi malgré l'obscurité et le froid.
Mes amis sont rentrés chez eux et comme d'habitude je suis la dernière. J’erre dans les rues car je ne veux pas rentrer chez moi malgré l'obscurité et le froid. 
 
Déambuler dans les rues désertes amplifie le sentiment de solitude. La journée il y a possibilité de rêverie, de basculer entre tristesse et sérénité, mais la nuit, la nuit, il faut rester vigilant, le moindre petit bruit entendu dans les rues silencieuses peut être très effrayant et même paralysant. Le silence existe-il vraiment ?
 
Se sentir en sécurité c’est comprendre le monde qui nous entoure.
Mon ennemi est la peur et la perte de contrôle ; continue à marcher......regarde ton ombre apparaître ; continue à marcher......regarde ton ombre se répandre ; continue à marcher......regarde ton ombre disparaître; continue de marcher......regarde ton ombre et tout ira bien….

FAZIA ZED / Janvier 2021
  Première semaine de sixième au collège. Jean Louis, beau garçon, me traite de grosse patate devant toute la classe. Première honte, première prise de conscience que je ne fais pas partie des filles désirables, que je suis dans la catégorie «bonne copine ».Je suis « taillée » pour l’amitié, pas pour l’amour… 
Classe de seconde, cours  sur les nutriments. La professeure demande de citer un exemple de lipides. Le garçon dont je suis secrètement amoureuse répond : « Nathalie ! ».
 Tout le monde rit et moi aussi...
Des années de « combat » entre régimes et crises de boulimie : découragement, solitude, gavage jusqu’à la nausée, dégoût de soi, c’est sans fin.
Et puis un jour, premier regard amoureux d’un homme qui me désire telle que je suis : Libération.

NATHALIE P / Février 2021
 Compliqué.
Je joue à l’arrière de la voiture avec ma sœur et l’innocence de mes huit ans.
Ma mère conduit, elle nous raconte que si nous n’étions pas là elle se serait écrasée contre un arbre.
Ma stupeur fut grande.
J’ai pensé qu’un arbre pouvait apparaitre devant toi quand tu conduis et t’écraser.
S’il faut éviter les arbres ! ça va être compliqué.
J’ai eu mon permis à quarante ans et cela a été très compliqué. 

FREDERIQUE GIORDANO / Février 2021
 RACINES
 Je suis de cette pomme
Aux effluves Persanes
Qui transporte mon âme
Et colore les versants
De ce mont qui bouillonne
Orange douce
Le vent me pousse
Je suis de cette Pomme
Aux fleurs andalouses
Qui de mille rubis
Éclate
Sauvage, et jalouse
Orange douce
Le vent me pousse
Je suis de cette Pomme
Couleur de lune
Âpre, Acide
Qui ne se confond
avec aucune
Loin de mon Île
Je suis aux confins
De l'Inde et de la Chine
Orange douce
Le vent me pousse
Je suis de tous
Ces jardins
D’oliviers et de raisins
De figues et de caroubiers
Je suis ce sable noir
Sans cesse ramené
Sur cette grève
Sans espoir
Loin de ma vie passée
Je suis de tous ces mondes
Et de ses barbaries
Que n'ai je pas fait
Orange amère
Le vent se terre
MARYSE FARGIONE / Février 2021
 SALOPARD

Je suis
Un salopard
Qui est resté
Fidèle
Un enculé
Sur lequel
On peut
Compter
Un connard
Bien trop
Gentil
Un enfoiré
Qui essaie
D'arrondir
Les angles
Un homme
Qui traverse
La vie
Avec des clous
Dans l'estomac

ANTONIO RODRIGUEZ YUSTE / Février 2021
 Blessures, 
Meurtrissures de l'âme. 
Vous taillez vos sermons, 
Au plus profond du cœur. 

Odeurs de sang, 
De terre,
D'espaces primitifs.
Envie de tout saisir. 
D'arracher sous le voile, 
La couleur essentielle.
L'extrême solitude,
La douleur des regards.
De comprendre le vide.
Les creux qui ensorcellent,
Vibrent les perceptions. 

Moisissure extrême des gestes, 
Coagulation du temps. 

Ma main se repose, 
Sur des parois fertiles,
Des chemins ensablés, 
De pensées assaillantes. 

J'entaille tous mes cris, 
Enfouis dans ces fissures. 
Ces échappées de vie,
Se posent sous mes yeux, 
Avides de les lire,
Les emprunter au ciel. 
Saisir dans leur lumière, 
Mes peurs, en pointillés. 

J'aime vous embraser, 
Vous rejoindre la nuit.
Faire de nos serments, 
Des corps qui se rapprochent. 

La nature me mord.
Longue plainte du monde, 
Sans cesse renouvelée. 
Qui gagne mes silences, 
Assouvit mes colères, 
Mes passions tourmentées. 

Cicatrices qui osent, 
S'offrir à mes empreintes. 


CHRISTINE RAULLET / Mars 2020
 J’ai toujours été précoce. J’ai eu mon premier accident de la route à deux ans et demi. Dès l’école maternelle j’ai été exclu du cercle des enfants. Pas par eux, ni par moi. Par personne. Par nécessité. Par nature. Par malheur. Ou par chance, on ne sait pas. Plus tard j’ai vu Jean Marais, assis dans un angle de son cachot de pierre, de roche et d’eau, cogner contre les murs sa tête d’Edmond Dantès hagard, en cadence. À gauche. À droite. À gauche. À droite… Je croyais que personne ne faisait ça – ça et des choses plus embarrassantes encore –, à part moi, dans le secret de mon château d’If personnel, et j’ai senti le serpent de glace de la peur me ramper sur le dos à l’idée que tout le monde, dans la salle du cinéma, allait me découvrir, pousser des cris de réprobation et de dégoût, et me signaler aux autorités médicales. On m’enfermerait à l’asile. Pas dans un cachot : j’y étais déjà, mentalement. On me ferait des piqûres pour essayer de m’en sortir. On me nourrirait de médicaments. On m’attacherait sur le lit. On m’électrocuterait de temps en temps. Je voulais bien qu’on me mette à l’abri dans une grande chambre où je ferais des dessins, comme Antonin Artaud – que je lirais au lycée et qui me terrifierait –, mais je ne voulais pas qu’on me fasse du mal. Ensuite j’ai trouvé dans la bibliothèque de mon père, une nuit, et beaucoup de nuits après celle-là, des dizaines de photos d’Auschwitz, de Treblinka, de Majdanek, de Sobibór, destinations et destin auxquels, d’un cheveu pour ce que j’en sais, il avait à peu près échappé. Pas complètement : mon impression est qu’il a redouté toute sa vie l’irruption d’une Gestapo intériorisée. Et il a été un exemple pour moi. Et c’était comme si j’avais évité la géhenne de Silésie, mais pas le fait qu’elle avait existé. D’une certaine manière, j’y étais allé. Et d’une certaine manière, je n’en étais pas revenu. Ça doit être pour cette raison que je n’aime pas les voyages. J’avais neuf ou dix ans. Quelques anniversaires ont passé. J’ai fini par comprendre, comme Kafka, que je n’avais rien à dire, jamais, à personne, et j’ai fait semblant de parler. J’avais fait semblant de parler depuis que je parlais, sauf qu’à présent je le savais. C’est très fatigant, de faire semblant de parler. C’est très fatigant d’être en dehors d’un soi qui n’existe pas. Encore plus, je suppose, que d’être en dehors d’un soi qui existe. Et c’est très fatigant de faire semblant d’être un enfant, d’être un jeune homme, d’être un homme, d’être un vieux monsieur, d’être quelqu’un, ou seulement quelque chose. Je ne sais pas si ce sera fatigant de faire semblant d’être mort. En tout cas il ne faut pas se plaindre. On sent et on pense. Le bonheur est dans la pensée, une espèce unique de bonheur. Je pense que je ne suis pas sorti de cette carcasse de voiture, berceau de rouille maintenant, mausolée de tôle mal fermé. Il y avait ces champs à l’envers et ces si volumineux nuages dans la vitre cassée. On ne devrait pas forcément réparer ce qui est cassé. Je ne crois pas à la réparation. Je ne crois pas aux idées simplistes. Parfois, la meilleure réparation c’est pas de réparation du tout. Et alors il faut l’écrire.
MICHEL WICHEGROD / Mai 2022
 La première blessure, cette année de mes 8 ans.
Grand-mère m’a dit « viens voir ta maman. » 
Je suis monté dans la chambre où l’on dormait habituellement avec mon frère.
Maman était allongée sur le lit, blanche, les traits tendus, les bras croisés sur son ventre, elle était très maigre, vieillie d’un seul coup.
Ma grand-mère a dit « dis-lui au revoir, tu la retrouveras au paradis. » Je l’ai embrassé sur le front, j’ai cru qu’elle dormait et que je la rejoindrais un jour, je ne pleurais pas, je ne comprenais pas ce qui se passait.
Les années suivantes, j’ai espéré la retrouver, je l’imaginais en regardant la lune, je voyais son visage et je pleurais l’abandon. Plus tard, je l’ai cherché vainement dans mes relations, mes compagnes, dans les objets qu’elle avait pu toucher à chaque cassure, chaque rupture, chaque deuil, je ressenti le vide de cette première déchirure, l’injustice, l’effroi qui arrive après, l’amour perdu.
SERGE VOULAND / Juillet 2022
 Il vivait avec moi. Il disait qu’il m’aimerait toujours et il répétait la même chose à une autre, en même temps, à une autre. Pendant quatre années consécutives. La honte totale. Pacs pour moi, mariage musulman pour elle. On en rirait. J’en rirais. Si je n’avais pas vécu quatre années à ses côtés, à partager l’intimité des corps, des journées entières à travailler côte à côte, tout ce temps à se refaire une famille, à lui offrir la généreuse hospitalité de la mienne. Cette blessure-là est récente, laide et déshonorante. Parfois nos blessures nous injurient. Injuries sometimes are injurious.
Je croyais ce qu’il disait parce qu’il était doux et que ses yeux brillaient. Parce que nous étions le couple le plus glamour de la littérature mondiale. C’était en tous cas le récit avec lequel il m’entourloupait.
Tout le monde le prend pour un homme sage, encore aujourd’hui et ma colère est sans borne. La blessure qu’il m’a infligée est pire que celle du coup de fouet, pourtant il n’a jamais levé la main sur moi. Il s’est bien débrouillé pour que les bleus atteignent l’os et l’âme. La blessure est une souillure.
A l’automne dernier, il m’a demandé de l’accompagner dans ce pays froid et peu riant : L’Autriche. Je l’ai suivi. Je ne savais pas qu’il allait en voir une autre. Il nous avait rapprochées pour plus de confort ? Je suis rentrée au bout de cinq mois, c’était prévu. Et quelques semaines plus tard, il m’a envoyé un message par WhatsApp pour me signifier la rupture. Il n’y avait pas d’explication. Let’s be friends, I need it. C’était tout ce qu’il avait écrit. Pourtant, son métier, c’est écrivain. 
Un couteau dans la gorge, j’ai marché des mois comme un canard à la tête coupée, cherchant la logique de cette rupture. J’ai cru mourir. Et j’ai fini par la trouver, minable et déshonorante : il vivait une double vie pendant les quatre années qu’a duré notre relation.
Je panserai cette blessure jusqu’à ce qu’elle se referme, puis disparaisse sous les autres cicatrices. Ma force m’accompagnera.
Et l’amour renaîtra.
 
ANNE BOURREL / Juin 2023
 Le couloir de l'amour, impasse ou voie sans issue, toujours suivre la lumière pour ne pas être déçu et continuer de respirer la vie. 
PHILIPPE UDINO / Mars 2020
 L’absence : une profonde blessure
La blessure... est cette douleur résidante en nous... enfoncée dans un endroit profond...
La blessure peut être causée par une infidélité.... Une séparation...un décès ou une absence…. Et cette dernière est pire que tout...L’absence laisse en nous des blessures ouvertes qui ne guérissent pas....
Tu sens en l'absence de quelqu'un que tu aimes, que les villes qu'il gardait sont incendiée... que les fleurs ont perdu leurs parfums, que les oiseaux ont oublié leurs chants, que les jours sont devenus semblables, le premier jour comme le dernier, et que la terre a cessé de tourner...L’absence tue cet enfant tumultueux en toi, et rien ne te réjouit... Même les couleurs deviennent semblables, le blanc comme le noir, le vert comme le jaune…Les blessures te poussent à fuir la musique ...et la poésie... parce qu'elles rendent la blessure plus profonde...L’absence est une blessure continue.... Elle impose à ta langue de démissionner...et à tes mots de perdre leurs sens...
Seul le retour de la personne qu'on aime… serait le baume pouvant guérir ces blessures et nous apporter de nouveau La folie… la passion et la vie…

HAMIDA EL JAZI / Février 2024
Traduction – MOHAMED HILMI CHADDADI

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الغياب: جرحٌ غائر

الجرحُ ...هو الألمُ الساكن فينا ...الغائرُ في مكان عميق ...قد يكون الجرح بسبب خيانة ...فراق...موت...أو غياب… وهذا الأخيرُ أسوءُ ما في الأمر...
الغيابُ يترك جراحا مفتوحة لا تعالج...تحس عند غياب من تحب أن المدن التي كان يحرسُها قد احترقت، وان الزهور فقدت عطرها، والعصافير نسيت تغريدها، والأيامُ صارت واحدة...أولها كتَاليها، والأرض كفّت عن دورانها...
الغيابُ يقتل الطفل المشاغب بداخلك، فلا يعود شيء يفرحُك .... حتى الألوان تصبح متشابهة، أبيضُها كأسْودها...أخضُرها كأصْفرها..... 
الجراحُ تجعلك تهربُ من الموسيقى ... من الشعر .... لأنها تعمق تلك الجراح أكثر فأكثر....
الغياب جرح مستمر...يجعل لغتك تستقيل... وكلماتك تفقد معانيها...
ورجوعُ من نحب فقط ...هو البلسم الذي يعالج تلك الجراح
ويعيد لنا الجنون...والشغف والحياة..
 D'une Douleur,

Qui m'accompagne chaque jour, chaque nuit, sans répit. Cette grande cruelle qui étreint sans pareil ma poitrine où chaque inspiration devient une lutte, un combat pour capter l'oxygène nécessaire à ma survie dans ce corps prisonnier. La douleur qui brûle, de ces poumons crépitants et la quête de l'air, d'un souffle qui étire le temps où les secondes deviennent une éternité. Le doute, la peur et l'angoisse s'installent lorsque la douleur invite l'étouffement à sa table et me rappelle constamment combien je suis fragile, vulnérable, en équilibre incertain sur le fil. Est-ce une bataille perdue pour moi ? Je ne le crois pas un seul moment, je ne l'ai jamais envisagée, je ne le veux pas ! A cet instant ultime où mes poumons déposent leurs derniers souffles, une fenêtre s'ouvre. La fin d'une histoire permet à la mienne de poursuivre son écriture dans une souplesse jusque-là inconnue. La douleur s'en est allée, le champ de bataille m'a désigné comme vainqueur. L'horizon s'est éclairci et le combat laisse place à l'apprentissage d'une nouvelle respiration, sans contrainte, sans entrave. La greffe a pris ! 
JEAN-MARIE SILLOU / Février 2024
 branche après branche
blessure après blessure
il a perdu son identité
rien de sa jeunesse
rien de son passé
son âme perdue
son histoire effacée
seule la terre qui l'engloutira
seule la terre se souviendra. 

à Jack

GISELE AMBAL / Novembre 2020
 Qui ne s’est jamais senti lésé, délaissé, malaisé ? 
Atteint dans son amour-propre, jusqu’à en devenir de l’amour sale. Au point de faire plier sa confiance en soi, en toi…hante-moi.  
 On nous met au monde, on nous soumet au monde. On nous aime, on nous mal-aime. On nous éduque, on nous inculque. On nous élève, on nous rabaisse. On nous explique, on nous réplique. On nous encadre, on nous recadre. On nous épate, on nous tape, on se retape. On nous étreint, on s’éteint. On nous blesse, on s’affaisse. Dans cette enfance, on nous offense. 
 On se pensait solide, pourtant si malléable. Droit et fier comme un pic, la protection forgée. Mais à trop s’y frotter, on s’y pique.  On nous tord, ça nous fait du tort. Alors courbé, plié, une corvée à redresser.   
Jusqu’à toucher l’autre, lui-même à peine relevé. Mais soudé. Comme attiré. On se ressemble, on s’assemble. Indissociable, on devient l’indice social. C’est chimique, physique, mathématique. On se tient, on se retient, on y met du sien. On nous tire, on s’étire. Éclat de rire, état d’écrire.  On se livre, on se délivre. On se fond, on se ferre. On apprend, on se surprend.  
 L’union devient force, barrière aux obstacles. On clôture, on endure. On ajoure, il fait jour, c’est fait pour. Vertical, vertigineux, grille de maux croisés. Le châssis soutient, le foyer revient, le chat assis, on se souvient. 
On est bien, juste quelques fissures. On a fait le plus dur. A l’usure, on est plus sûr. L’un jure, l’autre mesure, fini l’injure. On a muri, on s’est nourri. On ne les effacera jamais, on en a fait assez, les faits passés, lassé, délacés, l’effet dépassé. On a préféré les sceller dans le mur - laissez-les - et se libérer enfin de ses Blessures.

VALERIE GASTINE / Décembre 2020
 La blessure, c'est l'autre qu'on perd. 

YAN MORVAN / Octobre 2020
 Blessures liées à l'enfance, petites et grandes, celles que l'on sait et d’autres…chut...! Secret, secrets. On nettoie, on place des compresses, on comble, on referme, c'est propre. La cicatrice y est fine, quasi invisible, on ne touche plus, c’est fini. 
Mon métier, infirmière...clin d'œil? 

DOMINIQUE VARLET / Octobre 2020
 Comment une blessure trouve à s’infiltrer au travers du silence d’un  père, ce qu’il n’a pas pu confier, Pierrino Dante Gattinoni ce n’est pas son arrestation par des fascistes français  en tant que résistant, mais bien l’horreur quotidienne de ces quatre jours passés un vendredi saint dans les wagons plombés de nuit et brouillard, cet héritage inconscient m’a emmené un jour, en gare d’Arles, à ne pas supporter  le passage d’un long train de marchandises sinon en réagissant à la proximité du  bruit fracassant par la prise de vue en rafales, au final j’ai vu ma peur se matérialiser quand les roues métalliques par l’enjeu du mouvement sont devenues figures d’épouvante, la blessure héritée ce fut encore  à l’âge dit de raison le témoignage enfin concédé sur son quotidien vingt six mois  durant à Mauthausen, sa faim tous les jours recommencée qui m’a transmis ce rapport malade à la bouffe contre lequel j’ai lutté des années, de son séjour en terre de mort il est revenu pour me mettre au monde, absolu fils unique avec toutes ces blessures silencieuses. 

CHRISTIAN GATTINONI / Octobre 2020
 Confinés et Jaloux 
  Dans nos cellules
  Où
  De fortifiés judas
  Prophétisent un regard
  Qui ne viendra pas. 

JEAN-CLAUDE FEUILLARADE / Octobre 2020
 Comme une fracture douloureuse, aléas de la vie. C’est une distance qui s’installe et grandit au fil des jours. 
Au fil des mois. Au fil des ans. Plaie ouverte qui saigne toujours, insidieusement.
Ce sont des paysages, des rues, des fermes, des chemins poussiéreux, des vignes qui ne subsistent que sous forme de brumes diluées dans les replis de ma mémoire. Ce sont des odeurs qui persistent parfois à vouloir franchir la barrière de mes sensations oubliées. C’est un pays, c’est une terre natale, des rues, des quartiers, des cris d’enfants, des hommes et des femmes côtoyés, frôlés, appréciés, qui dérivent loin de moi depuis si longtemps maintenant. C’est une déchirure, un départ précipité, un vague signe de la main, certainement un dernier regard vers ces rivages qui s’amenuisent. Pour toujours mis à distance. C’est un manque évident, d’une autre histoire avortée que je n’ai pas vécue. Seulement imaginée. C’est un au-delà des mers contraint et forcé.
Méditerranée, infranchissable plaine liquide. C’est infiniment une perte qui a rongé mon âme de façon inconsciente. Je suis né sur ce sol, poussé mon premier cri salué par la lumière de juillet, dans l’odeur âcre des épices, du thé à la menthe, du cuir, des lauriers roses, de ce sable ocre qui collait aux pieds, cette terre écrasée par un soleil à l’esprit guerrier. Je suis enfant choyé de l’Algérie, mais l’Histoire a décidé de m’en éloigner à jamais.
À jamais.
Rapatrié…

JEAN REVERDITO / Novembre 2020
 Un effroi sorti tout droit de mon enfance…fils d’un père résistant et d’une mère raflée…Un effroi qui m’habite et qui ne s’est pas apaisé…face au monde contemporain 
qui le perpétue inexorablement…malgré les espoirs si souvent proclamés…
Il ne me reste qu’un reste de poing décharné, levé…rageur et défiant le ciel …un geste ultime…
Résistance. 

JEAN-NOËL CLECH / Novembre 2020
 Rien ne bouge. Chaleur moite. Lumière aveuglante. Je suis assise par terre, avec mon chien, à l’ombre d’un muret de pierres sèches. J’ai dix ans, lui aussi. Nous avons traversé ensemble les mêmes étés de solitude et d’ennui. Sa tête posée sur mes jambes maigres, nos yeux perdus dans les herbes brulées de soleil. Nous n’attendons rien, nous sommes ensemble, soudés. Tous les jours ainsi, dans ce silence. Soudain, un bruit, peut-être une voiture. Mélange de voix des pas aussi. Comme si le temps se précipitait. Devant nous, mon père et deux hommes m’arrachent le chien, le tirent, le poussent. Voiture noire, porte ouverte, porte claquée. Dernier regard, vrombissement du moteur, poussière blanche, silence immobile, sidération. 

NADINE VESSIER / Septembre 2020